Je suis né au Sénégal, en 1968, dans une petite ville, Louga, située entre Dakar et Saint-Louis. Fin des années 80 je suis arrivé à Strasbourg où j’ai fait des études de mathématiques. A Strasbourg, ma bourse s’élevait à 1490 francs soit, corrigée de l’inflation, 365 € aujourd’hui. Je résidais en cité U rue de Palerme.

J’ai intégré l’École Centrale de Paris pour devenir ingénieur. Cette école par où est passé Gustave Eiffel est un lieu exceptionnel de vie et d’échanges. On y apprend notamment la physique quantique, le génie civil, l’informatique  mais aussi des enseignements d’ouverture sur la philosophie. Notre pays manque cruellement de scientifiques en politique à un moment où, pour comprendre les phénomènes climatiques, agir rigoureusement et efficacement, une formation scientifique de haut niveau est un atout essentiel. Les sciences sont aussi un rempart contre l’obscurantisme et le complotisme où beaucoup se perdent.

Après mes études, j’ai travaillé dans le secteur numérique, d’abord dans des sociétés de service et ensuite comme consultant chez Accenture.

Français d’origine immigrée, j’ai vite vu et compris que si la France est belle, elle est fortement inégalitaire. Et quand on est africain du sahel ou du nord, les portes sont à peine entrouvertes. J’ai subi à Strasbourg mes premières insultes racistes. Mais j’associe toujours Strasbourg à une ville au passé à la fois tragique et lumineux et j’ai un lien particulier avec cette ville qui m’a accueilli et où j’ai beaucoup d’amis. J’ai un attachement à cette terre d’Alsace tant meurtrie et où bat le cœur de l’Europe.

Après 10 ans d’expérience dans le privé et grâce à un intérêt grandissant pour la politique – j’ai milité au MRAP puis au PS – et le fonctionnement de l’État, j’ai décidé en 2005 de préparer le concours de l’ENA. Tout le monde m’a dit que c’était impossible à réussir et que ce n’était pas fait pour moi. Mais j’aime relever les défis car tout est question de force de volonté et de dépassement. Je l’ai réussi du premier coup en cumulant travail et préparation intense entre janvier 2005 et septembre 2005.

L’ENA est condamnée par la caricature médiatique alors que peu la connaissent. Dans une promotion de 80, 40 « externes » viennent des Sciences po, principalement de Sciences po Paris et de la bonne bourgeoisie culturelle et économique : ce sont les jeunes qui, à 26 ans, en sortie d’école sont perçus comme arrogants car, il est vrai, exercent rapidement des responsabilités sans avoir parfois ni voyagé, ni vécu d’épreuves, ni été confrontés à la dureté de la vie. 32 viennent des administrations et ont déjà 5 ans d’expérience : profs, attachés, etc. Ces « internes » ont déjà plus d’expérience et de maturité. Enfin, 8 admis viennent du monde de l’entreprise après au moins 8 années d’expérience et un concours où seuls 8/110 candidats sont retenus. Je suis issu de ce concours : ce sont des anciens du privé qui se découvrent une vocation tardive mais forte pour le service public. J’en fait partie et ces profils ne font pas l’ENA pour l’étiquette ou le diplôme mais pour changer de parcours et en France, pour se mettre au service de l’État de l’Hôpital ou des collectivités territoriales, le concours reste la voie privilégiée.

J’ai souvent envie d’écrire un livre « J’ai fait l’ENA mais je m’en fous » car je n’y pense pas du matin au soir et je trouve surréaliste et injuste de classer dans une case des personnes si différentes parce qu’ils ont le même parcours de formation. Après 10 ans dans le privé, aucun moule conformiste ne peut vous transformer : vous êtes déjà une personnalité construite et vous prenez le meilleur du privé (la culture du résultat) et le meilleur du public (la passion de l’intérêt général).

Après l’ENA, j’ai choisi la Direction du budget, univers difficile où on apprend comment on finance les politiques publiques. C’est comme on dit une « prépa de l’État ». J’ai géré le budget de l’enseignement supérieur, de la recherche ainsi que du logement étudiant entre autres, puis en 2010, j’ai rejoint en mobilité le Conseil d’État en Section des finances et en sous-section contentieuse sur la fiscalité locale et le domaine public. Au conseil d’État, la mission consiste à être juge de cassation : il s’agit de rendre justice aux particuliers qui ont un contentieux avec les services publics lorsqu’ils ont épuisé tous les recours. J’ai rendu notamment une décision connue pour faire payer des entreprises basées au Luxembourg qui refusaient de payer leurs impôts.

J’ai participé à la campagne de 2012 en soutien de Hollande, après la fin de parcours de DSK qui était mon candidat favori. Après l’élection, j’ai rejoint le cabinet de Mme Fioraso avec comme portefeuille : le numérique, le budget des opérations campus et le lancement d’un programme de 40 000 logements étudiants. En 2014, j’ai rejoint le cabinet de Mme Taubira pour gérer le budget, l’immobilier et la modernisation de la justice. J’ai vécu aux côtés de cette ministre qui est une figure d’exception des moments qui forgent le caractère et l’engagement : les attentats contre Charlie et le Bataclan.

En 2015-2016, j’avais décidé de m’éloigner de la politique, notamment du PS qui était censé incarner la gauche et qui était devenu peu à peu un appareil vide de pensée, tenu par des apparatchiks qui se partagent les mandats et qui était devenu à la fois déconnecté de la vie des Français et des évolutions du monde. Avec les attentats du Bataclan, j’ai vu de près la tragédie des morts innocents, l’injustice inexplicable d’être fauchée en pleine vie. Le Français que je suis, fier de l’être, fier aussi de ses racines, ne peut se résoudre à ce que des jeunes Français préfèrent la perdition et se laissent embrigader dans les voies dangereuses de l’extrémisme.

J’ai décidé de me réengager. J’avais déménagé à Aubervilliers pour me rapprocher du nouveau site – le Millénaire 3 – du ministère de la Justice où je travaillais. J’étais donc en plein dans le 93 où se joue un des enjeux les plus essentiels pour le pays : comment refaire société, faire cité ensemble et, au-delà de nos origines et de nos convictions religieuses (ou non), mettre la fraternité au-dessus de nos différences ? Comment faire en sorte que les jeunes se sentent tous Français mais que la France ouvre aussi les portes de la réussite aux jeunes du 93 victimes de discriminations de toutes sortes ?

Ma conviction : il faut vite recoudre le pacte républicain, laïc et social pour ne pas laisser notre société se diviser en archipels irréconciliables.

L’urgence en 2016 était de battre Mme Le Pen au plus haut dans les sondages. Trump avait gagné en novembre 2016 et tout était possible désormais pour les populistes les plus dangereux. Aussi, j’ai rejoint Emmanuel Macron car j’ai vu en lui le seul capable de nous éviter Mme Le Pen mais aussi M. Hamon dont les idées – taxer les robots ! – étaient des aberrations démagogiques.

(…)

Je suis candidat à Saint-Denis car c’est l’aboutissement de tout ce parcours. Cette ville magnifique sombre dans l’insécurité, et le clientélisme. Nos enfants, tous les Dionysiens, anciens ou nouveaux, n’ont pas mérité de vivre dans une ville délaissée, dégradée où le clientélisme et la ghettoïsation mettent en danger l’égalité et le pacte républicain et social. Si nous sauvons Saint-Denis du clientélisme, de l’incurie des élus actuels – y compris ceux de l’opposition qui sont aussi un clan d’intérêts risqué – nous sauverons les jeunes, les enfants et tous les citoyens qui veulent une ville propre, sûre, belle, où l’espoir renaît, une ville attractive, dont on sera fiers.

Le combat est difficile car pour garder leur « propriété », les réseaux en place sont prêts à tous les coups, à toutes les tricheries, à tous les mensonges, loin des idéaux respectables des doctrines politiques dont ils prétendent porter la bannière.

C’est pourquoi je lance un appel aux électeurs de Saint-Denis de ne pas se laisser voler leur voix, de ne pas laisser Saint-Denis, la ville des rois, disparaître par 6 ans de plus de gestion par une extrême gauche soi-disant révolutionnaire mais qui se gave de privilèges et qui en réalité méprise le peuple.